La 90 type 85 d’Etienne

Toutes les Audi ne sont pas grises

Je ne sais plus quand j’ai entendu pour la première fois le bruit du 5 cylindres Audi, mais il ne m’a pas fallu longtemps pour décider qu’un jour j’en aurais un aussi. L’architecture atypique (le seul autre 5 cylindres de grande série à l’époque était le 3 litres diesel Mercedes), les prouesses des quattro en rallye et le fait que mes parents n’aient connu que des VW ont achevé de me convaincre. Comme voulais une voiture neuve pour la garder le plus longtemps possible, trois modèles entraient dans un budget encore accessible bien que déraisonnable pour un jeune de 23 ans : 90 2.0, 100 2.0 et VW Passat GT. J’ai immédiatement écarté le type 44 pour cause de rapport poids/puissance et d’espace inutile dans mon cas. Quant au coupé GT qui aurait pu convenir aussi, la version de base était équipée du 4 cylindres 1.8 de la 80 GTE, la version 5 cylindres (KV) étant largement hors de mes moyens J’ai attendu la fin de production de l’Audi ou de la Passat pour bénéficier du meilleur tarif.
Le rêve s’est réalisé en décembre 1986. Le 30 novembre, je prenais une option sur une des trois dernières Audi 90 disponibles en Belgique. J’avais le choix : rouge titien, graphite ou gris pierre. Sur ces fins de série, Audi offrait les jantes Ronal, les vitres teintées et le toit ouvrant, tout juste les options que j’aurais choisies. Une reprise canon de ma Polo a achevé de me convaincre, et le 3 décembre je repassais chez mon concessionnaire pour signer le bon de commande. Arrivé là, on m’apprend que le patron du garage venait de se tuer sur la route. Il devait prendre livraison d’une 90 quattro gris pierre avec les mêmes options que la mienne, et elle était là toute neuve sur le parking. Malgré les conditions plus qu’intéressantes, je ne l’ai pas prise : trop chère à assurer et à faire rouler. Le 20 décembre, je faisais les premiers tours de roue au volant de ma nouvelle Audi. Cela a été mon plus merveilleux cadeau de Noël.

Depuis, elle a toujours été entretenue et réparée dans le réseau VAG, principalement chez Achêne Motors à Ciney à l’exception des pneus, amortisseurs et échappements. De plus, je fais moi-même une vidange entre chaque visite, soit tous les 3750 km ou au minimum chaque année depuis que j’ai commencé à rouler beaucoup moins. En ce qui concerne les pneus, je permute régulièrement entre l’avant et l’arrière pour avoir la même longévité sur le train complet.

1986
20 décembre : livraison de la voiture neuve. Elle est équipée d’un autoradio cassette Philips AC750 en deuxième monte. Dès son premier démarrage, elle a souffert du mal habituel des 5 cylindres Audi, à savoir le claquement des poussoirs hydrauliques à froid. Le chef d’atelier a d’ailleurs cru bon de me prévenir de ne pas m’en inquiéter tant que cela disparaît à chaud.

1987
8 janvier : courrier enquête de satisfaction à l’occasion de la livraison du véhicule neuf.
21 janvier : première vidange + filtre huile à 2500 km. Marquage antivol des vitres.
Rien à signaler aux différentes révisions (7500, 15000 et 22500 km).

1988
Fin janvier, l’horreur. La voiture est volée à Wattrelos (Nord de la France) un soir de semaine. Heureusement, elle est retrouvée dès le lendemain avec la custode droite brisée et la colonne de direction forcée. A part cela, elle est saine et sauve. Même l’autoradio est resté en place ! L’assurance règlera les dégâts.
RAS pour le reste de l’année 1988, et je décide de remplacer l’autoradio Philips par un Pioneer au son bien meilleur. Rien à signaler aux révisions (30000, 37500 et 45000 km).
Après 30000 km, les pneus Firestone H 660 d’origine demandent grâce. Ils sont remplacés par un train de Goodyear NCT.

1989
4 mars – 53283 km. Vidange intermédiaire chez VAG et remplacement du cable d’allumage qui s’est coupé net sur la route quelques jours auparavant. Panne bénigne mais immobilisation immédiate. Un bricolage de Touring Secours sur place a paré au plus pressé.
17 mai – 60960 km. Entretien 60000 km et remplacement du liquide de freins.
A l’automne 1989, je reçois une voiture de fonction. Comme il devient évident que l’Audi va rouler beaucoup moins, je lui offre un traitement Dinitrol, j’espère ainsi prolonger sa durée de vie. A partir de maintenant, elle ne sort plus tous les jours et sert encore de « dépannage » à ma mère à l’occasion.

1990
6 janvier. Je supprime l’assurance tous risques et consacre le montant de la prime au montage d’une alarme Piranha 618.
24 février – 70900 km. Remplacement de deux ampoules au tableau de bord.
L’éclairage droit du tableau de bord (au niveau du compte-tours) se montre capricieux. L’ampoule s’allume quand elle veut bien. Je démonte, je resserre, mais cela ne résous pas le problème. Le 20 mars, retour chez VAG qui contrôle le circuit imprimé mais ne trouve rien. En désespoir de cause, j’essaie de serrer le contact avec du papier alu, mais cela n’améliore pas vraiment les choses.
A l’automne, cela empire du côté de l’éclairage. En démontant une fois de plus, je me rends compte que le support d’ampoule est déformé par la chaleur. Le 28 novembre, il faut passer par le remplacement du circuit imprimé et du compte tour dont le support d’ampoule est solidaire. La facture est salée : 15 870 francs belges, soit 393.41 euro y compris préparation pour le contrôle technique.
80000 km : remplacement des pneus Goodyear par un train de Fulda Y2000. C’était une monte d’origine très répandue à l’époque sur les voitures allemandes.

1991
Au printemps, la pédale d’embrayage manque de rappel. Verdict : plateau et butée à remplacer. Le disque d’origine est remis en place : il est comme neuf !
7 mai – 90147 km. Entretien + plaquettes de frein + remplacement plateau et butée d’embrayage. Grosse facture : 24957 francs belges, soit 618.67 euro.
Le silencieux arrière et les amortisseurs avant sont morts. Remplacement chez mon marchand de pneus/amortisseurs/échappements.
26 octobre – 97500 km. Vidange intermédiaire + remplacement de la courroie de distribution. Le joint de l’aérateur central de la planche de bord étant cassé, on remplace l’aérateur.
16 décembre – 100026 km. Trace au sol dans mon garage, la pompe à eau fuit légèrement à l’arrêt (mais pas moteur tournant !). Elle est remplacée.

1992
23 mai – 105754 km. A l’occasion d’une révision intermédiaire, on remplace le soufflet de cardan gauche et la courroie d’accessoires. Le cardan est intact, il reste en place.
25 août. Remplacement du relais de pompe à essence qui a déclaré forfait quelques jours auparavant. C’est ma deuxième immobilisation au bord de la route, et même si ce n’est pas bien méchant, c’est râlant. Je ne suis pas au bout de mes surprises en passant chez VAG : prix de la pièce seule 505.91 francs français, soit 77.13 euro. Mon concessionnaire belge me confirme que c’est bien le tarif normal.

1993
27 mars : remplacement de la poignée de porte arrière droite. Pas très solide au départ, elle n’a pas beaucoup aimé l’inaction que mon statut de célibataire lui impose.
30 avril – 119729 km. Entretien 120000 et remplacement de la batterie qui commence à s’essouffler.

1994
29 mai. Un gosse s’amuse à jeter des cailloux sur les voitures qui passent. La portière arrière droite en prend un coup. Réparation chez le carrossier, réglée par l’assurance familiale des parents.
130000 km. Remplacement des pneus par 4 Uniroyal Rallye 540.

1995
9 août – 145000 km. Remplacement du silencieux central.
20 septembre – 149782 km. Entretien 150000 + plaquettes de frein AV.
28 septembre – 150444km. Remplacement paliers pour bras de guidage.

1996
22 mars – 158937 km. Contrôle du circuit de charge et remplacement du régulateur de tension. Depuis un certain temps, le voyant de charge s’allume de façon presque imperceptible au ralenti. C’est visible seulement dans l’obscurité, et cela ne semble pas avoir de conséquences. Cette intervention n’a pas résolu le problème.
12 avril – 159687 km. Contrôle de l’alternateur et remplacement des roulements. Aucune anomalie détectée à l’alternateur mais le voyant continue de s’allumer imperceptiblement.
14 mai – 161200 km. Remplacer grille bloc compteur et refixer masse supplémentaire feux arrière. Le problème est toujours là, et je m’en accomode.
20 septembre – 166284 km. Révision 165000 km. Remplacement des essuie-glaces et règlage des roulements AR.

1997
Janvier : d’autres priorités financières m’obligent à remiser la voiture. La seule façon de la garder en circulation serait de s’en servir comme unique voiture pour tous les jours, et je n’y tiens pas. Un voisin de mes parents me propose de la remiser dans un hangar lui appartenant. L’endroit est idéal : pas d’humidité et une ventilation suffisante. Je vais la faire rouler un peu quand je retourne chez mes parents, environ une fois tous les deux mois.

1999
Avril : réveil de la bête. La batterie qui n’était déjà plus en toute grande forme déclare définitivement forfait. Le 10 avril, l’Audi se retrouve chez mon concessionnaire habituel pour une grosse remise à niveau : révision complète, batterie, disques et plaquettes AV, ressorts de suspension AV (un est cassé), butées tournantes d’amortisseurs, remplacement du liquide de frein. De plus, deux pneus ne passeront pas au contrôle technique. Une fois n’est pas coutume, c’est le concessionnaire qui s’occupera de leur montage. Elle passe le contrôle technique haut la main et est à nouveau immatriculée le 10 juillet. Elle a 173229 km. J’ai acheté d’occasion des jantes Ronal d’un coupé GT de 1985, deux sont pratiquement comme neuves, deux sont noires de poussière de frein incrustée. Je fais sabler les quatre plus abîmées du jeu de 8 alors en ma possession, mais j’ai la mauvaise idée de les peindre moi-même. De loin, le résultat est impeccable, mais il vaut mieux ne pas regarder de près. Deux sont montées avec les deux pneus qui viennent d’être placés pour le contrôle technique, les deux autres sont chaussées de neuf (Dunlop Sport D8, un pneu au style « années 80 »).
29 octobre – 175212km. La tête et le doigt d’allumeur sont toujours d’origine. Ils montrent des signes de faiblesse évidents et sont changés.
10 novembre – 176235 km. Changement de la courroie de distribution.

2000
1er février – 176532 km. Remplacement roulement avant droit. Dépose de l’alarme qui ne fonctionnait de toute façon plus. Bonne nouvelle, cela résous le problème de voyant de charge.
5 février. Remplacement des haut-parleurs AR d’origine par des Kenwood plus puissants mais dans l’emplacement d’origine.
17 mai – 177431 km. Le contrôle technique détecte une usure avancée des flexibles de frein AV. Comme ils savent que j’ai grand soin de ma voiture, ils ne me font pas revenir. En principe, j’étais bon pour une contre-visite. Je fonce illico chez mon concessionnaire pour remplacer les flexibles.
23 juin – 178100 km. Un contrôle des freins AV, et je n’en sais pas plus. Je n’ai rien noté de particulier et ma mémoire me fait défaut.

2001
5 mai – 184188 km. Révision et préparation pour le contrôle technique : remplacement câble d’allumage et réglage phares.

2002
Un seul endroit est attaqué par la rouille : le numéro de châssis. Vraiment bizarre car je suis bien placé pour savoir qu’on ne l’a jamais bidouillé. Le contrôle technique veut bien me laisser passer, mais ce n’est jamais que reporter le problème d’un an. Le 18 juin, la voiture retourne chez l’importateur à Bruxelles pour refrapper le numéro sur la cloche d’amortisseur gauche. Tarif pour cette simple opération : 150 euro.

2003
Elle tourne par moment sur 4 cylindres. C’est aléatoire, cela peut arriver n’importe quand et cela peut s’arrêter comme c’est venu. Ce sont les pannes les plus difficiles, car elles ne se manifestent évidemment que quand il n’y a pas de mécano à l’horizon. Le concessionnaire l’examine sous toutes ses coutures : ce n’est pas l’allumage. Avant de déculasser, il consulte l’importateur et on lui conseille de vérifier les injecteurs. Bingo, le cinquième est encrassé. Un bon nettoyage, et c’est reparti.
Fin 2003, au détour d’Internet, je fais connaissance d’Audisportcollection. Tiens, il y a d’autres amateurs de 5 cylindres en ce bas monde ? J’envoie une photo pour le recensement et quelques autres pour la galerie, mais il faudra assez longtemps pour que je me manifeste sur le forum : je ne suis pas un sorcier de la mécanique et je n’ai pas la connaissance encyclopédique ni la documentation de certains.

2004
Printemps mouvementé. Fin avril, la température montre des signes de hausse inquiétants en ville, et il me semble que le ventilateur ne se déclenche pas systématiquement. Le radiateur n’a pas l’air beau du tout, mais pas vraiment de traces de fuites. Manifestement il y a consommation de liquide de refroidissement, mais cela reste très limité. La veille de mon rendez-vous chez le concessionnaire, je fais encore un essai, une grosse fuite se déclare en haut du radiateur et le voyant de refroidissement se met à clignoter. On dirait qu’une surpression a eu raison du radiateur. J’ai de grosses craintes pour mon joint de culasse. Sur les 70 km qui me séparent de chez mon concessionnaire, l’Audi a avalé 4.5 litres d’eau et quand je suis arrivé, elle tenait plus de la locomotive à vapeur que de l’automobile. Seul le remplacement du radiateur a été nécessaire. La mise en pression n’a pas révélé de problème d’étanchéité du circuit et le contacteur du ventilateur est OK. On en profite pour faire changer huile et filtres et pour remplacer les amortisseurs et les deux ressorts de suspensions avant. Ceux qui avaient été remis en 1999 étaient des pièces d’occasion provenant de je ne sais quelle voiture, et ils semblaient légèrement trop hauts.

Entre-temps, j’avais appris l’existence d’Audi-heritage. Le programme de la printanière est bien tentant, et c’est l’occasion de rencontrer d’autres passionnés. Je n’ai jamais lu un road book de ma vie, mais je me lance. Comme beaucoup, j’ignore à quoi ressemble le château d’Haltinne et j’ai été incapable de compter les autres, mais l’ambiance était au beau fixe.

Dès la semaine suivante, l’Audi s’en va chez le carrossier. Les bas de caisse, les passages de roues et le bord du toit ouvrant commencent à souffrir de rouille. Il y a aussi un point à la base du coffre (peinture cloquée sur environ 2 cm²) et quelques coups de gravillons aux endroits habituels. On va traiter tout cela et finir par une nouvelle peinture. Mi-juillet, lorsque je reviens de vacances, la voiture est pratiquement prête, mais deux problèmes se posent. Tout d’abord, il manque les moulures latérales, mais mon carrossier me dit qu’elles sont en commande, et plus grave les clips pour la moulure à la base des vitres latérales. Sans ceux-ci, pas moyen de remonter la voiture. En démontant, le carrossier n’a pu en récupérer que la moitié, et il a interrogé deux concessionnaires VAG sans pouvoir me dépanner. Le premier l’a tout bonnement envoyé promener en lui disant que la voiture était trop vieille et qu’on ne trouvait plus rien comme pièces dans le réseau. C’est le genre établi récemment et qui ne sait pas qu’il existe autre chose que l’A4 TDI. Le deuxième n’a pas donné signe de vie après un premier contact, il semble que les vieilles Audi ne soulèvent pas l’enthousiasme dans le réseau. J’appelle alors mon concessionnaire habituel qui me dit que je peux disposer des clips le lendemain si je les commande aujourd’hui. Je commande sur-le-champ, et j’appelle mon carrossier. Entre-temps, il avait eu des nouvelles : le deuxième auquel il s’était adressé était en congé, et en fait les pièces attendaient là-bas. Mauvaise nouvelle, il manque les deux petites moulures d’ailes AR et plus gênant la moulure d’aile avant droite. Enfin, les clips sont là, ce qui est le principal. J’aurai donc des clips en trop, mais vu le prix dérisoire, c’est une sage précaution en cas de problème ultérieur.

Le 29 juillet, la voiture est enfin prête, comme neuve mais sans ses moulures. Lors d’un arrêt sur le chemin du retour, une fumée suspecte s’échappe du capot. On dirait bien qu’une durite est percée. Je contrôle le niveau de liquide de refroidissement, il est OK, le niveau d’huile aussi. Le concessionnaire diagnostique une fuite du joint de cache-soupapes. Je profite de mon passage chez lui pour confirmer la non disponibilité des moulures qui me manquent. Il me confirme, ce n’est plus disponible non plus en Allemagne. Par contre, le magasinier a un jeu complet neuf pour son coupé GT qu’il avait fait repeindre sans replacer les moulures, et il est d’accord de me céder le morceau avant droit si c’est le même que celui qui me manque. Il faut seulement qu’il remette la main dessus, ce qui sera chose faite mi-septembre.

Ces aventures me font prendre conscience que l’approvisionnement en pièces peut devenir difficile. Je fais savoir que je suis preneur d’une épave pas trop chère. Fage m’en déniche une dans une casse liégeoise, une traction gris Zermatt avec un moteur KV. Je fais affaire, et le 11 novembre on la monte sur un plateau pour la stocker chez mes parents car pas de place chez moi.

Si on fait le compte de ce qu’elle m’a coûté ces derniers temps, c’est une folie. Par contre la valeur sentimentale et le plaisir pris à son volant sont inestimables, c’est pourquoi je lui pardonne ses petits défauts et les pièces qui lâchent de temps en temps. Elle souffre des maux chroniques de nos 5 cylindres, à savoir poussoirs qui claquent et ralenti capricieux à froid (déjà lorsqu’elle était neuve), démarrage difficile à chaud (apparu très vite après l’achat). Elle a connu un problème apparemment classique sur les types 81/85 : des fuites aux coins inférieurs du pare-brise qui transforment le tapis de sol en éponge par temps de pluie. Une bonne couche de mastic en est venu à bout.

Laissons le mot de la fin à mon épouse qui a commencé par trouver ma voiture plutôt chère et envahissante mais qui est rassurée depuis qu’elle connaît les membres les plus fondus d’Audi-Heritage.

Etienne

© PBLCT / AUDI-HERITAGE 2005

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