Sous les projecteurs : Jean-Louis

jl4« Vous êtes sûrs qu’il y a un chemin là ? »  L’éclairage n’est pas ce qu’il y a de plus performant sur une 100 type 43, et ce n’est pas sans appréhension que suivant les indications de Jacques assis à la place du mort, j’oblique vers la gauche sur la route principale plongée dans la nuit noire.  Arrivé au bord de la chaussée, miracle, un petit chemin au revêtement indéterminé apparaît en contrebas.  Les quelques centaines de mètres suivants me font revivre les films de mon enfance où le héros est baladé les yeux bandés dans une voiture vers le repaire des bandits, sauf que j’ai les yeux bien ouverts et que c’est moi qui conduit.  Autrement dit, ne me demandez pas de dire par où je suis passé, je n’en ai pas la moindre idée sauf qu’il faisait noir comme dans un four, que ça fleurait bon la campagne et que ça se passait sur les hauteurs de Huy.

100_109313Nous finissons par apercevoir une A2 sagement garée, il est temps de mettre pied à terre au sens propre du terme.  Jean-Louis nous accueille sur le pas de la porte, mais avant d’y parvenir, nous avons déjà repéré un disque de frein, quatre ressorts, une assise de siège, et ce n’est pas tout.  Alors en route pour la première partie de la visite en extérieur.  Jean-Louis, avantagé par sa connaissance du terrain, avance d’un pas sûr et commente les différents points d’intérêt : là un différentiel de quattro, un peu plus loin deux boucliers de 90, et enfin la 200 20v et l’ur-quattro blanche que vous connaissez bien.  Le froid ayant raison de notre courage, c’est avec plaisir que nous acceptons l’invitation de Jean-Louis à entrer.

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Dès l’entrée, son intérêt pour la compétition se manifeste sous la forme d’une rangée de miniatures des fabuleuses R8 qui se sont illustrées au Mans ces dernières années.  Rangées par saison, de 1999 à 2005, nous pouvons admirer ces championnes qui ont rarement laissé échapper la victoire, comme en 2003 où c’est une Bentley qui a recueilli les lauriers.  Une Bentley vous dites ?  Mais c’est surtout un casque qui nous intrigue.  Et Jean-Louis de commencer à raconter, des souvenirs passionnants que peu de nous ont entendus vu sa discrétion :
pict0067ret–    « Ca, c’est mon casque, j’ai fait de la compétition il y a bien longtemps ».
–    « Aaaah ???  Où, quand ? »
–    « A 20 ans, j’étais commissaire de stand, puis j’ai commencé la compétition en groupe 2 à Zolder.  C’était sur une Alfasud TI, ma voiture de tous les jours que j’avais transformée, fait préparer par Mattozza et repeinte moi-même.  Mon équipier et moi avons gagné notre première course !  C’est ainsi que j’ai couru de 1980 à 1982, et puis j’ai encore fait trois courses de côte en 1987 avant de raccrocher définitivement ».
numeriser0017retSur un mur trône la photo des premiers exploits, où l’Alfa rouge semble se détacher sur une photo qui serait prise en noir et blanc.  Jean-Louis ouvre l’album souvenir et nous fait revivre ces temps héroïques avec émotion.  Les courses avec leurs bons et moins bons moments, comment l’Alfa n’a pas survécu à un tête-à-queue terminé violemment à Francorchamps.  Nous ne savions rien de tout ça et ouvrons des yeux comme ça devant toutes ces photos.  Parce qu’il y a dans cet album non seulement la compétition, mais aussi les premières voitures : d’abord une Simca 1000 Rallye 2 avec laquelle il n’a pas tardé à savoir ce que signifiait un tête-à-queue, puis une TR6 rouge, voiture pour laquelle Jean-Louis a toujours eu un faible, une BMW 528i, qu’il avait repeinte lui-même un jour de beau temps avec un résultat qui force l’admiration…

numeriser0007ret–    « Mais alors, Jean-Louis, comment es-tu venu aux Audi alors que rien ne semblait t’y destiner après Alfa, BM et les autres ? »

–    « En 1991, je voulais remplacer ma vieille Escort 1.6 D, et j’étais fan de quattro depuis les exploits de Michèle Mouton.  Je voulais une quattro pour voir ce que ça faisait, et j’ai trouvé une 200 quattro de 1988, une 182 ch.  Le vendeur annonçait une consommation de 15 à 16 litres, quand je regardais la consommation instantanée en accélération, ça montait jusque 55 ou 56 litres, mais en moyenne je n’ai jamais dépassé les 12 litres.  Et puis sur la neige, c’était incroyable comme comportement.

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En 1994, un gars m’a coupé la route.  Je roulais cool mais je suis quand même passé au travers de sa Citroën CX en envoyant sa remorque dans trois autres voitures, le strike parfait.  L’avant de l’Audi a été complètement écrasé, les roues avant au niveau des portières, elle était morte.  J’ai été reconnu en droit, mais l’indemnisation bien que confortable a traîné et en attendant, j’ai roulé dans une Corsa 1.3 GT.  Petite bombe, mais déjà fort fatiguée.  J’ai cherché d’autres Audi, je suis tombé sur une ur-quattro préparée, avec ailes, portes, capot en polyester mais j’ai laissé tomber.  J’ai été voir le parc export de l’importateur, il y avait deux 200 mai aucune ne m’inspirait, fin 95 j’ai finalement acheté une Golf TDI 90, tirée à 135 ch chez Dederich, un vrai sorcier celui-là, qui a transformé la 90 en lui donnant des performances incroyables.  Ca fumait, mais ça enterrait tout.  En 2000, je me suis offert une autre Golf pour mon anniversaire, une 115 ch 4 motion.  Elle n’a pas survécu longtemps, sal… d’Haldex qui passe de deux en quatre roues motrices sans qu’on puisse prévoir !

numeriser0013retEn 2002, je tombe sur une annonce pour une ur-quattro à vendre en Allemagne.  J’avais été en voir une autre, une noire, à Hambourg peu de temps auparavant, mais elle ne m’inspirait pas.  Celle-là était à Stuttgart, chez un des chefs d’atelier de Mercedes Trucks Stuttgart, un centre d’entretien gigantesque, un bâtiment de 1500 mètres de long avec des dizaines de lignes d’entretien, un hôtel, un restaurant, etc…  J’ai pris la route pour aller la voir.  Quand je suis arrivée, elle était malheureusement vendue, mais en reprenant ma voiture, je vois une 200 20v.  Elle était aussi au chef d’atelier, et elle était aussi à vendre.  On l’amène sur un des ponts, l’examen inspire confiance, et la semaine suivante, j’ai pris le train jusque Cologne, puis ICE jusque Stuttgart.  Retour à 180 km/h, inimaginable à tous points de vue : performances, confort…».  Elle avait 225 000 km, elle en a 375 000 aujoud’hui.  Puis en 2005, en cherchant des pièces, je vois une ur-quattro à vendre à Boncelles.  Plaques françaises et remontée à la 6-4-2, il a fallu deux ans pour qu’elle soit en ordre et l’immatriculer.  Il y avait de la rouille dans les ailes, mais elles ont été abîmées lors du sablage, trop de pression, elles étaient complètement ouvertes.  La droite a pu être redressée, la gauche non et elle a du être remplacée.
–    « Et comment as-tu connu Audi-Heritage ? »
–    « En 2005, Fa m’a contacté en voyant que je m’intéressais aux pièces Audi sur internet. »
–    « Ah oui, Fa !  Le nombre de membres qu’il a recrutés de cette façon ! Sa technique était bien au point si on en juge par les résultats !»

pict0059retVient le moment de découvrir les trésors de Jean-Louis : des stocks de pièces méticuleusement rangées et répertoriées sur son ordinateur : numéro, description, numéro de la boîte de stockage, son organisation force le respect.  Et en examinant quelques unes de ces pièces, nous nous extasions devant son génie en matière d’adaptabilité, et plus encore devant le soin qu’il apporte à ses pièces.  Avant d’être rangées, elles sont soigneusement remises en état et nettoyées, comme il le dit lui-même c’est du plug and play.  En effet, dans sa caverne d’Ali Baba, il n’y a que du premier choix.  Les boîtes squattent les coins disponibles jusque dans la penderie, dont les vêtements ont émigré sur une rambarde bien pratique, et ce stock contient le matériel pour la remise à neuf de la 200 20v dont Jean-Louis veut encore profiter longtemps, on le comprend !

pict0142retLa partie de campagne s’achève devant une bonne bouteille, une cuvée spéciale Chambertin dont nous garderons un souvenir ému.  Il est temps de continuer la soirée à Huy, dans un sud-américain recommandé par Jacques.  Ambiance folk avec à défaut des danseuses réclamées par notre trésorier, un chanteur guitariste de talent digne émule de Cat Stevens, éclairage parcimonieux qui fait dire qu’on aurait bien apporté la deuxième bouteille de cuvée spéciale pour se servir en douce, et cuisine délicieuse (le steak gaucho…), la conversation continue bon train sur un des sujets de prédilection de Jean-Louis : la compétition où brillent les R10, et en particulier les Le Mans Series.  Et dans la foulée, il nous conseille un site, jetez un œil ici :

http://www.americanlemans.com/home/ALMSHome.aspx.

http://www.lemans-series.com/

http://www.joest-racing.de/web/start/index.php?sprache=e..

La soirée avançant, on entre de plain pied dans les rêves, des plus sages aux plus fous.  La 200 5T type 43, la 80 ou 90 quattro sont encore du domaine de l’accessible, mais si Jean-Louis se découvrait un oncle d’Amérique ?  Il garderait sa petite maison, mais s’offrirait un garage, et quel garage : R8, R10, Sportquattro, Aston Martin…  Rien que du beau monde.  Et aussi un garage Audi-Heritage, où chacun pourrait venir et trouver le matériel qu’il n’a pas forcément à sa disposition.

Vient l’heure de se quitter, et de remercier notre hôte de la soirée pour son accueil, et avoir levé le voile sur sa passion pour les Audi, que sa trop grande discrétion a gardée méconnue aux yeux de beaucoup d’entre nous.  Bonne route aux volants de tes quattro, mais aussi de la A2, déjà rare et dont la moindre qualité n’est pas de ne consommer que 4.2 l/100 km.  Ca aide à nourrir les autres !

Texte : Etienne « Le Titien »
Photos : Patrick
Les enquêteurs : Jacques et Arnaud.

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